Optimisation de la transmission de l’entreprise familiale : le Pacte Dutreil

La loi de finances pour 2001 a créé un dispositif fiscal appelé « le Pacte Dutreil » favorisant la transmission de l’entreprise par succession, qui a été étendu en 2003 aux donations.

Il est nécessaire de rappeler que le principe, lorsque l’on reçoit par donation ou par succession des biens, des parts sociales, générera des droits de mutation sur la valeur des biens au jour du transfert de propriété.

Ainsi, le décès du chef d’entreprise contraignait généralement les héritiers à vendre la société afin de pouvoir payer lesdits droits de succession.

De même, pour un chef d’entreprise qui souhaitait transmettre sa société à ses enfants, toutes les taxes sur cette transmission pouvait le dissuader.

C’est à ce niveau qu’entre en jeu le Pacte Dutreil car il va permettre, sous certains conditions, de réduire le montant de ces droits.

Les avantages / le principe

Ce dispositif va alors permettre de réduire de 75% la base taxable aux droits de mutation à titre gratuit.

Les droits sont ainsi calculés sur 25% de la valeur de l’entreprise.

A cette réduction d’assiette de 75% sur la valeur peut s’ajouter une réduction des droits de mutation de 50% si la transmission se fait par donation en pleine propriété avant les 70 ans du donateur.

Cet abattement est en plus de cela cumulable avec tous les autres abattements prévus lors des donations ou successions.

Exemple pratique : vous possédez une entreprise évaluée à 1.000.000 € et vous souhaitez la céder à votre enfant. Vous aurez donc un abattement de 75%.

Ces 250.000 € au titre de l’abattement bénéficieront ensuite de l’abattement de 100.000 €.

Vous serez ainsi imposé sur une assiette de 150.000€.

Cependant, cet atout fiscal nécessite un certain nombre de conditions et d’engagements.

Champ d’application / société éligible

Il est bon de noter que ce dispositif s’applique aux titres de sociétés françaises mais également étrangères.

Ce dispositif est également applicable peu importe le régime fiscal de la société, c’est à dire que la société soit éligible à l’impôt sur le revenu ou à l’impôt sur les sociétés n’a aucun impact sur sa mise en place.

Toute société exerçant une activité commerciale, industrielle, artisanale, agricole ou libérale peut en bénéficier.

Par ailleurs, les entreprises gérant un patrimoine immobilier comme les SCI ou certaines holdings sont exclues du dispositif Dutreil.

A noter que le pacte Dutreil s’applique autant aux transmissions en pleine propriété qu’en démembrement de propriété (usufruit/nue-propriété).

Point sur les holdings

Une holding est une société créée dans l’optique de détenir des parts de ses filiales.

En fonction de ses actions, la holding est qualifiée comme « animatrice » ou « passive ».

Une holding passive se contente uniquement de détenir des titres d’autres sociétés, tandis qu’une holding animatrice va en plus de détenir des titres fournir certains services (juridiques, financiers, administratifs…).
Le caractère animateur va ainsi lui conférer des avantages fiscaux et lui permettre de bénéficier de l’abattement de 75%.

Conditions / fonctionnement

Pour pouvoir bénéficier de cet avantage fiscal, de nombreuses conditions sont requises. Dès lors qu’une condition ne serait pas respectée dans le délai imparti, l’exonération sera immédiatement remise en cause.

La 1° condition est que l’entreprise exerce une activité commerciale, industrielle, artisanal, agricole, libérale ou de holding animatrice ;
La 2° condition est que le défunt ou le donateur prenne un engagement collectif de conservation des titres, d’une durée de 2 ans minimum à compter de la signature du pacte.
Cet engagement doit être pris par le donateur ou le défunt pour lui set ses ayants droits avec d’autres associés, ou seul s’il est associé unique ;
En l’absence d’anticipation, il est toutefois possible de souscrire un engagement post mortem par les héritiers dans les 6 mois suivant le décès ;
La 3° condition est que ledit engagement doit porter sur au moins 17% des droits financiers et 34% des droits de vote pour les sociétés non cotées (pour les sociétés cotées, 10% des droits financiers et 20% des droits de vote) ;
La 4° condition réside dans l’engagement individuel que doit prendre le donataire, au moment de la transmission, de conserver les titres pendant 4 ans, à compter de la fin de l’engagement collectif ;
La 5° condition nécessite que la direction de la société soit assurée pendant la durée de l’engagement collectif et pendant les 3 ans qui suivent la transmission par l’un des donataires ou encore par l’un des associés signataires de l’engagement collectif.

Remise en cause de l’exonération

Ce dispositif très avantageux est par ailleurs très contrôlé et peut être rapidement en cause.

C’est le cas notamment :

– En cas de cession pendant l’engagement collectif de conservation ;

– En cas de non-respect des obligations relatives à la fonction de direction pour les sociétés soumises à l’IS ou à l’activité principale pour les sociétés non soumises à l’IS ;

– En cas de non-respect par un héritier, légataire ou donataire de l’engagement individuel de conservation ;

-Enfin, en cas de non-respect des conditions de seuils de détention pendant l’engagement collectif.

Évolution

Ce dispositif est en perpétuel évolution puisqu’il a suivi plus de 20 modificatifs depuis sa création.

La loi PACTE de 2019 est venue à nouveau modifier le Pacte Dutreil afin de le rendre plus attractif pour les entreprises, notamment en :

agrandissant son champ d’application aux sociétés unipersonnelles
réduisant les seuils de participation de 34% à 17% pour les sociétés non cotées
simplifiant l’apport des titres transmis à une société holding

Auteur : Me Elodie LIGIER

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